Quand la ville se lève

Après l’écriture d’Une Place Dépeuplée et la création du Noyé du Cher, Charlotte Lagrange poursuit l’écriture d’un texte qui interroge l’impact du territoire, de l’urbanisme et de la domination de la terre sur les trajectoires intimes de chacun.

Crédits Photos
Couverture © Michael Wolf
Photo © Mathieu Pernot

Création 2025

2023/2024 – RÉSIDENCES DE RECHERCHES ET D’ÉCRITURE

Première résidence autour de Quand la ville se lève
→ Résidence d’écriture à Montréal organisée par le Conseil des Arts et des Lettres du Québec (CALQ) en partenariat avec la Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon – Centre national des écritures du spectacle : 16 mai au 27 juin 2023

Résidences de recherche sur les territoires
→ Résidences de recherche à Culture Commune, scène nationale du bassin minier du Pas-de-Calais – Loos-en-Gohelle : 9 au 14 octobre 2023 / 15 au 19 janvier 2024 / 5 au 9 février 2024
→ Résidence de recherche avec la Scène de Recherche – Gif-sur-Yvette : novembre 2023 / janvier 2024 / février 2024
→ Atelier de recherche avec des collégiens PACTE
→ Workshop de recherche Sciences et Arts avec le master AR-RC (Année Recherche – Recherche Création) de l’ENS Paris-Saclay
→ Atelier d’écriture autour de ces problématiques avec les étudiants de l’Université Paris-Saclay

Résidences d’écriture
→ Résidence d’écriture à la Maison Jacques Copeau à Pernand-Vergelesses : 19 au 28 février 2024 / 4 au 12 mars 2024
→ Résidence d’écriture à la Maison Mainou à Vandoeuvre (Suisse) : 15 avril au 4 mai 2024

Résidences de recherche au plateau
→ Travail à la table avec l’équipe de création à la Scène de Recherche – Gif-sur-Yvette : juin 2024
→ Résidence collective et résidence à la Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon : 7 octobre au 3 novembre 2024

 

2025 – RÉPÉTITIONS ET CRÉATION

→ Résidence au Nouveau Relax, scène conventionnée de Chaumont : 22 avril au 3 mai 2025
→ Résidence à la Scène de Recherche : 2 au 7 juin 2025
→ Résidence au Théâtre Joliette, Scène conventionnée de Marseille : 1 au 13 septembre 2025
→ Répétitions et création : 3 semaines à l’automne
→ Création à l’automne 2025

Tournée 2025/2026 : ACB – Scène nationale de Bar-le-Duc Meuse, Théâtre de l’Union – CDN du Limousin, Nouveau Relax – scène conventionnée de Chaumont, La Scène de Recherche – Gif-sur-Yvette, etc.

Distribution

Texte et mise en scène : Charlotte Lagrange

en cours

Production

Production La Chair du Monde

Coproduction – en cours Le Théâtre du L’Union – CDN de Limoges, L’ACB – Scène Nationale de Bar-le-Duc Meuse, Le Nouveau Relax – Scène Conventionnée de Chaumont, La Scène de Recherche – Gif-sur-Yvette, Culture commune – scène nationale du bassin minier du Pas-de-Calais, Théâtre Joliette Scène conventionnée de Marseille
Recherche de partenaires en cours

Aide à la résidence
Centre National du Livre,
Conseil des Arts et des Lettres du Québec (CALQ) en partenariat avec La Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon – Centre National des Ecritures du Spectacle et le CEAD (Centre des Auteurs Dramatiques, Montréal) pour l’accueil.

Accueil en résidence
Culture Commune – scène nationale du bassin minier du Pas-de-Calais

 

Note d'intention au 29 septembre 2023

Après avoir travaillé sur les mécanismes sous-terrains de la gentrification dans une courte pièce intitulée Une place dépeuplée, puis sur la manière dont la ville est le lieu mais aussi l’objet des luttes sociales dans une pièce destinée à jouer dans les rues de Montluçon et intitulée Le Noyé du Cher, j’aimerais prolonger mes recherches pour aborder la question du territoire à une plus grande échelle. Alors que la première pièce avait pour contexte une place publique et la seconde, une ville, cette troisième pièce se jouera à une échelle nationale, voire internationale.
Cela sera une manière d’aller plus loin dans la compréhension de l’impact de l’aménagement du territoire sur les destinées individuelles et sur l’intériorisation des rapports de pouvoir.

J’aimerais ainsi écrire une pièce polyphonique, une fresque de plusieurs heures, où des trajectoires intimes, éloignées en apparence, seront tissées les unes aux autres par un grand projet d’aménagement du territoire. Cela formerait une ramification de fictions singulières à l’image des réseaux de transports et de communication entre les villes et les pays.

Pour seul cortège de Laurent Gaudé guidera ma recherche formelle. Ce roman fait dialoguer des personnages par-delà les frontières géographiques, et par-delà la mort, pendant que le cortège funéraire d’Alexandre le Grand traverse les terres qu’il avait conquises.
J’aimerais m’inspirer de cette manière de faire avancer une même fable par l’entrechoquement de personnages aux histoires et aux géographies distinctes pour écrire Quand la ville se lève.
La domination de la terre et les rapports de pouvoir humains se lisent en creux dans le récit mythique de Laurent Gaudé. C’est ce lien-là, entre ces deux problématiques de pouvoir sur l’humain et sur les territoires, travaillé par le trouble entre le réel et l’invisible qui m’intéresse particulièrement.

Comment habite-t ’on le monde et comment nous en sentons-nous les possesseurs ou les locataires provisoires ? Comment intériorisons-nous les rapports de domination sur les humains et sur la terre ?

Pour écrire la pièce, j’ai besoin d’entrer dans un regard subjectif en rencontrant des personnes, en écoutant leurs histoires et leurs points de vue intimes.
Il me faut quitter la vision géographique pour plonger dans une vision kaléidoscopique et intime de ces enjeux.
Il me faut partir du réel, des mécanismes souterrains d’aménagement du territoire, d’appropriation des terres et d’expulsion des habitants pour fictionner et écrire une pièce qui soit documentée sans être pour autant documentaire.

J’aimerais donc travailler sur un grand projet d’aménagement du territoire en rencontrant les nouveaux habitants et nouveaux usagers, ainsi que celles et ceux qui connaissaient et vivaient l’espace autrement. Je voudrais comprendre comment ces projets sont perçus subjectivement.
A quel point avons-nous conscience de l’évolution de l’espace, et de la manière dont l’évolution de l’espace change notre rapport au monde ?
A quel point celles et ceux qui pensent ces aménagements du territoire sont-iels consciente·s de l’impact et des échos profonds en chacun·e ?
Mais également : comment ces projets se forment ?  Car si souvent on imagine que c’est la pensée d’un architecte ou d’un urbaniste qui s’applique sur un espace, c’est peut-être davantage par la multitude de pensées et d’enjeux qui se greffent les uns aux autres que se modifient non seulement l’espace visible mais les relations sociales et les relations intimes aux lieux.

Pistes de mise en scène

Je m’interroge sur le fait d’utiliser tout l’espace du théâtre. Pas seulement la boite noire, mais aussi le hall, les possibles parvis, éventuellement les coulisses ou les espaces de stockage, pour recréer à chaque représentation un parcours in situ qui permette aux spectateurs d’être eux-mêmes dans le mouvement et la traversée de la fiction.
J’aimerais ainsi créer un lien entre l’intérieur et l’extérieur. Ne pas me restreindre à la boite noire. Mais au contraire, créer un cheminement pour y entrer, ou pour en sortir.
En tissant plusieurs fils narratifs, j’aimerais ouvrir la possibilité d’avoir plusieurs entrées en matière, plusieurs mondes qui se côtoient, travaillés par des registres différents.
L’idée est de continuer le travail sonore en espace public du Noyé du Cher pour engendrer ensuite une plongée dans l’univers fictif, comme si on entrait dans un film.
Je repense beaucoup au film de Wim Wenders, Les ailes du désir, dont on traduirait littéralement le titre par « Le ciel au dessus de Berlin ». Dans ce film, Wim Wenders est parti de la ville et de son histoire pour écrire une fiction où des anges voient depuis le ciel et entendent les voix intérieures. Lorsqu’ils chutent dans le monde terrien, alors la couleur revient. Cette chute, cette plongée, après la vue du ciel est une piste dramaturgique importante pour travailler la vision de notre territoire et mettre en tension la vision urbanistique et géographique avec les regards et sensibilités particulières de ceux et celles qui habitent et modifient ces lieux de l’intérieur.

Pistes de recherche

Pour préparer cette nouvelle pièce, je vais mener une recherche auprès d’urbanistes, de sociologues et d’ « usagers », d’habitants ou passagers sur plusieurs territoire.

Mon premier terrain d’enquête était à Montréal pendant une résidence croisée avec la Chartreuse et le CEAD en 2023. Cette première étape m’a permis de poser les fondations dramaturgiques du texte à venir avec l’accompagnement d’un conseiller littéraire. La ville de Montréal étant marquée par une forte crise du logement, les rencontres que j’y ai faites ont fortement résonné avec mes problématiques.

Mon second terrain d’enquête sera sur le plateau de Saclay avec la Scène de Recherche de Gif-sur-Yvette.
C’est un lieu étonnant où les populations nouvelles et anciennes semblent se croiser dans un espace commun sans pour autant se mélanger et où la nouvelle université rutilante, dont l’objectif politique est d’en faire une université concurrente sur le plan international et qui a été pensée suivant des normes environnementales, a été construite sur les dernières terres agricoles franciliennes. Une ZAD tente de résister au projet du Grand Paris, et à l’arrivée de la ligne 18 qui va accélérer le processus d’artificialisation des sols, tandis que de nouveaux logements dessinent une ville nouvelle autour de l’université.
Le plateau forme ainsi un grand projet architectural qui témoigne potentiellement des envies de grandeur de la France et qui peut permettre de relier la question environnementale à celle du logement.

Mon troisième terrain d’enquête sera autour de Loos-en-Gohelle avec Culture Commune, scène nationale du bassin minier du Pas-de-Calais, un territoire encore fortement marqué par son passé minier malgré la désindustrialisation et son appauvrissement consécutif. Ce territoire me semble très singulier par son organisation en archipels et son maintien d’une mémoire minière. Il me permettra de travailler mes questionnements depuis une perspective qui éclairera les enjeux d’appropriation du territoire très différemment.

La multiplicité des terrains de recherche me permettra de former une pièce kaléidoscopique, où des villes qui ne sont pas au centre de la France et de ses préoccupations politiques deviendront précisément le paysage central de cette pièce.

Pistes de synopsis

Lorsque j’étais en résidence à Montréal j’ai commencé à rédiger les premières pistes d’écriture, en partant de l’histoire d’une femme qui refuse de quitter un immeuble qui va bientôt être démoli pour cause d’insalubrité. On est alors dans les années 90 à Paris, très peu de temps après la dérégulation des prix des loyers. Et les rêves qu’elle fait sont chargés d’une forêt ancienne que Colbert s’apprête à sauver de l’usage dérégulé et ravageur qu’en font les paysans voisins. Une certaine forêt aux chênes multicentenaires qui sert à reconstruire Notre Dame aujourd’hui.

Charlotte Lagrange