Résidence artistique en milieu de santé – Saison 2019/2020

Les Ailes Déployées et Le Théâtre de la Ville


Avec Charlotte Lagrange, David Lescot, Faustine Noguès, Ilyess Benali, Johanna Faye
David Lescot m’a proposé de rejoindre une grande équipe d’acteurs, auteurs, danseurs et chorégraphe qui allaient suivre plusieurs groupes de patients dans différents centres. Et tout cela autour du rythme, ou avec le rythme, de cette notion difficile à définir et qui pourtant est en tout :

« Maintenant, si vous me demandez ce que c’est que le rythme, si j’essaie de trouver une définition comme celle des dictionnaires, je ne suis pas sûr d’y arriver. Mais c’est ce qu’il y a de bien avec le rythme : sa nature appartient à chacun, il n’est jamais figé en lui-même, et s’il vient de la musique, il s’étend à toutes sortes de domaines. » écrivait David dans une lettre à tous les participants. 

Alors dans une année heurtée par l’arrivée du coronavirus, juste avant un temps arrêté, et juste après son redéploiement, nous avons écrit. Et c’est l’histoire du rythme qui s’est imposée. Comme s’il était un personnage que nous allions trouver en toute chose.

Entre temps, il y avait eu un travail du corps qui a d’autant plus libéré les imaginaires, qui a autorisé chacun à écrire selon son rythme intérieur puis à jouer.

Et c’est en juillet, alors que nous étions sensés avoir fini les ateliers depuis longtemps, que nous avons tout réorganisé pour passer plusieurs jours d’affilée ensemble, chercher ensemble et voire émerger une construction collectif d’imaginaires individuels.

Je dois dire pour cet atelier a été pour moi l’occasion de belles rencontres avec des univers denses, sensibles et très ouverts sur le monde.

Vous trouverez un échantillon de toutes ces compositions et quelques slogans ironico-pamphlétiques sur le confinement qui nous avait arrêté mais pourtant pas empêchés de continuer notre exploration rythmique du rythme. 

Charlotte Lagrange

SLOGANS

1 – Tu manques de temps
T’es impatient
Besoin d’une pause
Retour à l’essentiel
« Confinement tour »
Et tu finiras moins con

2 – Le confinement
Découvrez la vraie vie de vos enfants

3 – Un peu de confinement de temps en temps
Des économies pour longtemps

4 – Avec le confinement
Vive le rangement

Robin – La naissance du rythme

Je suis né d’une explosion d’étoiles, explosion d’une grandeur époustouflante
C’est à ce moment-là que tout est allé très vite pour moi
J’avais seulement quelques secondes de vie mais déjà tellement d’évènements s’étaient passés
Bim Bam
D’autres explosions. Encore et encore.
C’est quand j’ai repris mon souffle que j’ai pu apercevoir des millies d’étoiles scintillantes, au-dessus de moi.
Je peux prendre mon temps maintenant, me laisser aller au gré du vent.
Ce doux vent qui me donne envie de créer.
Comme une nécessité.
Tout repart alors jusqu’au dinosaure.
Une lenteur incroyable m’habite désormais.
Je vois des « hommes » bien plus tard encore.
Je me sens rassuré avec eux puisqu’ils me convoquent d’un bout du monde à un autre
Chaque fois d’une manière particulière
Je ressens cette nécessité de créer pour eux aussi
Je suis né d’une explosion d’étoiles mais je n’en suis pas sûr
Je ressens comme une naissance nouvelle, à tout moment je suis là avec des êtres vivants ou non
Car les éléments ne font qu’un avec moi et je ne me contrôle pas toujours
On peut jouer avec moi et selon ses envies
Je me cherche encore dans ce vaste champ d’étoiles
Je prends mon courage à deux mains et je pousse mes jambes afin d’atteindre la planète Rouge devant moi
Là je trouverai peut-être un nouvel environnement nécessaire à mon évolution

Rémi – Le rythme de la bataille

Frappe, Frappe, un mort ! Ah non pas paré donc pas passé ! Clap clap clap, tiens-moi il faut frapper quand on nous applaudit. Esquive, Ha, Ha, deuxième coup, sur mon plat de métal, Lancé ! perdu, entrechoc des épées. Je l’ai trans- percé l’Empereur. Tué celui qui m’a lancé. Ha non révolte. Hip Hip Hip Hourra s’écrient les armes en silence car tel est leur langage. Allez Spartacus. Waouw on avance et monte dans les créneaux de la gloire ; je croyais que c’était la gloire, mais y’en a un à saisir de créneau. Ah non c’est fini ben c’est une arène. D’autres armes, la garde arrive. « Épée ! » « Aux fourreaux ! » Hooo non. « Ren- dez-vous. » Fuyons. Ah non jamais de lâcheté. Pourquoi il me lâche celui-là ? Plus besoin d’attaquer. Plus qu’une défense. En tortue. Ha on fait de l’art. Mais si, mais si, les images. Oh c’est beau ce gros rocher. Il casse toute l’arène, là où on a été tenus pour la première fois. Nous n’allons pas être cassés. Mais non, mais non, l’on est né dans une métallurgie. saleté de forgeron. Allez Allez Allez Combats ! Let’s fight ! Pour la paix ! C’est qui celui-là ? Un comique ?

Qui a gagné ? On fait les comptes. Dix épées au sol. Trente perdues, cinquante oubliées. Les boucliers fuient. Nous on gagne à faire la guerre, hé oui, les armes gagnent tout le temps dans ce genre de cas. Fin du rythme de la ba- taille.

Inès – La mort du rythme

Flash info du samedi 14 mars 1998, non attendez on est samedi ? Lundi ? Il est 20h, non 18 heures, enfin bon je ne sais pas et cela a peu d’importance.
Alerte information : le monde a perdu le rythme !!!

Fait incroyable, aujourd’hui, cette nuit ou ce matin. Nous n’avons pas d’information précise, le monde s’est déréglé. Le soleil et la lune nous ont offert un spectacle tout aussi majestueux qu’inquiétant disparaissant à tour de rôle.

Nous ne savons pas à quelle heure exactement mais les aiguilles des horloges, des pendules, se sont mises à perdre la raison réalisant une danse incroyable sur leur cadran jusqu’à s’en décrocher. Depuis, impossible de savoir quel jour nous sommes ni même quelle heure il est.

Nous recevons des images effroyables provenant de chaque continent, chaque pays.
Les villes sont à l’arrêt, les rues désertes, les écoles fermées, et les commerçants ont baissé le rideau. Quand à ceux qui font de la ré- sistance, le monde les rappelle à l’ordre ne leur offrant que peu de clients.

Nous avons pu interroger Olivier Bertin, chercheur à l’agence na- tionale du rythme, qui n’a pas pu pour l’instant nous fournir plus d’informations pouvant expliquer le phénomène que le monde est en train de vivre.

e Je me réveille lentement, j’ouvre un œil puis je tente d’ouvrir le 2 .

C’est difficile, je me rendors
Nous sommes à Paris, au XXIIe siècle
Ici il n’y a plus de réveil, c’est notre corps et nos envies qui dictent nos journées

Les gouttes de pluie