En novembre 2023, Charlotte Lagrange a animé trois sessions d'ateliers d'écriture "Initiation à l'écriture romanesque et dramatique" à l'attention de toustes à la Scène de Recherche de l'ENS Paris-Saclay.

Celui qui regarde du dehors à travers une fenêtre ouverte, ne voit jamais autant de choses que celui qui regarde une fenêtre fermée. Il n’est pas d’objet plus profond, plus mystérieux, plus fécond, plus ténébreux, plus éblouissant qu’une fenêtre éclairée d’une chandelle. Ce qu’on peut voir au soleil est toujours moins intéressant que ce qui se passe derrière une vitre. Dans ce trou noir ou lumineux vit la vie, rêve la vie, souffre la vie.

Par-delà des vagues de toits, j’aperçois… une patate douce. Ou bien le soleil qui se couche. Mais si le soleil était une immense patate douce ? Ca me mènerai dans une impasse, il vaudrait mieux que je m’en passe. Des idées j’en ai pas des masses, il va falloir que je m’y fasse… Déjà en disant ça je casse la dynamique mais c’est ma place, car jamais je ne me lasse d’écrire que je cherche quoi écrire… peut-être un peu des fois quand-même… alors revenons sur ces toits, sans patate douce pour cette fois.

Par-delà des vagues de toits j’aperçois… quoi ?
Peu de choses à dire vrai
Déjà c’est pas tout près
Et puis la nuit est très
Sombre. Alors je crée
d’un petit coup de craie
tout ce qui me paraît
approprié, qui serait
à sa place dans l’obscurité
L’obscurité… où la ville n’est pas la seule plongée
Mon esprit cherche en vain des idées
De ce qu’il pourrait bien dessiner
Mais pour le moment rien n’y fait…
Rien ne vient, rien qu’un vide complet
Une légende c’est bien cela ? Retournons donc sur ces toits.

Par-delà des vagues de toits, j’aperçois… rien ma foi… Mais maintenant que j’y pense à force d’expliquer, en usant toute sorte de formes étriquées, que vraiment rien ne sort de mains peu inspirées, je réalise avoir simplement oublié de me poser d’observer d’envisager ce que derrière ces toits je pourrai bien trouver.
Malheureusement le temps qui m’étais compté ne m’a pas laissé l’occasion de regarder.

Alors sans transition peut-être un peu quand-même
Une fois de plus j’ai juste fait ce que j’aime.
En guise de légende pour revenir au thème
Le manque d’inspiration revient comme un anathème
Et jamais je n’écrirai de texte cohérent, inspiré, qui remplit l’objectif initial, et surtout ne dise pas une fois de plus qu’il n’y a rien à dire, et qu’il est désormais tant de conclure sans chute ni finalement de transition :

Peut-être me direz-vous : « es-tu sûr que cette légende soit la vraie ? ». Qu’importe ce que peut être la réalité placée hors de moi si elle m’a aidée à vivre, à sentir que je suis et ce que je suis.

 

Texte de Thimothé Soulage, participant à l’atelier
La consigne était : compléter entre « par-delà des vagues de toits, j’aperçois… » et « Peut-être me direz-vous »